Résumé

Le transport des bovins avant abattage est un enjeu crucial qui combine des considérations de bien-être animal et de qualité de la viande. Une récente étude publiée par Mendes et al. (2024) dans la revue « Veterinary & Animal Science » a examiné l’impact des distances et durées de transport sur la qualité de la viande issues de vaches de race Limousine en France.

En France, premier producteur de viande bovine en Europe, la recherche sur les effets pratiques du transport sur ces paramètres est encore limitée. L’étude de Mendes et al. (2024) a exploré ces aspects en utilisant un échantillon représentatif de 4 407 carcasses de vaches Limousines, provenant principalement de la région du Limousin. Cette recherche, réalisée dans des conditions commerciales, apporte un éclairage nouveau sur les interactions entre pratiques de transport et qualité sensorielle de la viande, avec des implications directes pour l’industrie agroalimentaire et le bien-être animal.

 

Contexte : le défi du transport et de la qualité 

Le transport des bovins est un facteur de stress important, susceptible d’influencer la qualité de la viande. Parmi les indicateurs utilisés, le pH ultime (pHu) est un marqueur clé : un pHu élevé (>6,0) est souvent associé à une viande dite à coupe sombre (également connue sous le terme DFD pour « Dark, Firm, and Dry »), souvent jugée de qualité inférieure. Par ailleurs, d’autres critères comme le poids des carcasses, le persillé ou encore le potentiel sensoriel global de la viande (indice MSA évalué selon la méthode australienne du Meat Standards Australia) sont également susceptibles d’être impactés par les conditions de transport des animaux.

 

Méthodologie de l’étude 

Les bovins étudiés ont été transportés depuis des fermes situées à différentes distances de l’abattoir (moins de 50 km, 50-150 km, 150-250 km) pendant des durées considérées comme courtes (≤47 min), modérées (47-71 min) ou longues (>71 min). Les pratiques de transport respectaient strictement les réglementations européennes, avec des protocoles standardisés pour minimiser les facteurs de stress (densité de chargement, repos avant abattage, accès à l’eau). L’analyse des données recueillies avait pour but de modéliser l’impact des conditions de transport sur la qualité des carcasses et des viandes.

 

Résultats principaux : des effets limités mais significatifs 

L’étude a montré que ni la distance ni le temps de transport n’avaient d’effet significatif sur le pHu moyen des carcasses, qui restait conforme aux standards de qualité (avec une moyenne de 5,76 ± 0,13). Cependant, une légère diminution du pH ultime a été observée dans les zones les plus éloignées, ce qui pourrait être lié à des pratiques spécifiques ou à des conditions environnementales locales.

Le potentiel global de qualité (indice MSA) n’a pas été impacté de manière significative ni par la durée ni par la distance de transport. Le persillé et le poids des carcasses sont restés constants, reflétant une gestion efficace des bovins pendant le transport.

Il ressort en outre que les vaches transportées sur des distances plus longues ont présenté des carcasses un peu plus légères, bien que les variations restent minimes et sans impact perceptible sur la qualité sensorielle de la viande.

 

Perspectives et implications pour l’industrie 

Cette étude a permis de souligner que des pratiques de transport bien gérées, associées à des distances limitées (moins de 99 km), permettaient de minimiser les impacts négatifs sur la qualité de la viande, même si l’impact n’est pas signifiant pour les plus grandes distances, non plus.

Avec ces résultats, des conseils ont pu être formulés aux opérateurs de terrain afin d’optimiser les pratiques de transport des animaux, tout en améliorant le bien-être animal et la rentabilité économique dans le secteur bovin. La suite des travaux vise à intégrer des mesures directes de stress (cortisol, lactate) afin d’approfondir la compréhension des mécanismes sous-jacents.

 

Pour plus d’information :

Da Silva Rodrigues Mendes, N., Silva, R. R., Kombolo-Nagh M., Rivet P.P., Tondusson J., De Oliveira, T. F., Chriki, S., Ellies-Oury, M. P., Hocquette, J. F., 2024. Does transport stress affect eating quality of limousin cattle in France Veterinary and Animal Science.

https://doi.org/10.1016/j.vas.2024.100411

Contact : Marie-Pierre ELLIES

Marie-Pierre.Ellies@agro-bordeaux.fr

 

Unité de Recherche : UMR Herbivores, INRAE

Cette étude s’inscrit dans le cadre de la thèse de Nathalia Mendès, réalisée sous la co-direction de Marie-Pierre ELLIES (BSA), Sghaier CHRIKI (ISARA) et Jean-François HOCQUETTE (INRAE). La soutenance de la thèse, réalisée en cotutelle avec L’université de Goias au Brésil, est prévue le 17 décembre 2024.